Edition No 3/2022

Mercedes-BenzArocs 3363 LS Idéal pour de très lourdes charges Jérôme Recordon Près de 25 ans d’expérience Page 9 Revue de presse Notre initiative dans les médias Essai Le nouveau RenaultTrucksT Page 18 Page 26 Série «Jeunes chauffeurs» Philipp Hankh, 28 ans Le mensuel spécialisé des chauffeurs professionnels N° 3/ 2022 ISSN 1423-4319 Fr. 7.50

PRÉVOYANCE VOYAGES HABITATION VÉHICULES DROIT PME pROFIteZ DE VOS avAntages PERSONNELS Pour une offre ou un conseil: avantages@routiers.ch, Tél. 021 706 20 00 ou en contactant directement votre conseiller. Vous êtes membre des Routiers Suisses? Alors profitez du partenariat avec Allianz: conditions spéciales sur les solutions auto, moto et ménage. Nous nous occupons de tout, également en cas de problème. Nouveau: jusqu‘à 15% de réduction

1 CAMION 3 / 2022 Editorial +++ En couverture L’entreprise Addor, à Gstaad (BE), transporte des machines de chantier particulièrement lourdes. Une tâche que le chauffeur Patrick Gander mène désormais à bien avec un nouveau MercedesBenz Arocs 3363 LS équipé d’un embrayage à ralentisseur turbo TRK sur lequel il ne tarit pas d’éloges. (Photo: Daniel von Känel) Contact: Mercedes-Benz Trucks Suisse SA, Bernstrasse 55, CH-8952 Schlieren. Page 18 Page 26 Page 9 +++ Jérôme Recordon Près de 25 ans d’expérience +++ Revue de presse Notre initiative dans les médias +++ Association «Nous protestons aussi mais de manière constructive!»........2 +++ Droit Disposez-vous d’une protection juridique adéquate?. ................3 +++ Essai Avec le nouveau RenaultTrucks T High 520 au col du Bözberg +++ Sondage Les conséquences du coronavirus sur la livraison de camions.........6 +++ Rubrique «Jeunes chauffeurs» Philipp Hankh, 28 ans............10 +++ Carburants alternatifs L’Alliance eFuel promeut les carburants synthétiques...........14 +++ TachiFox Des mises à jour gratuites....... 22 +++ Rubriques Programme des cours............. 40 Relais routiers........................ 42 Canton duTessin..................... 44 Un avenir qui s’annonce sous de meilleurs auspices Il est beaucoup question d’avenir dans le présent numéro. Par exemple l’avenir de notre profession que les Routiers Suisses entendent défendre avec leur initiative populaire dont les revendications ont suscité un bon écho médiatique (lire en page 9). Nous nous sommes également demandé quand la production de camions retrouverait une situation normale après avoir été ralentie par la crise sanitaire et la pénurie de semi-conducteurs. Notre sondage en page 6 révèle qu’une certaine normalité est attendue dès 2023. Ce numéro évoque également les carburants alternatifs. Faut-il tout miser sur l’électricité et abandonner les motorisations thermiques? Non, répond le groupement d’intérêts Alliance eFuel qui milite en faveur des carburants synthétiques (lire en page 14). Non, répond également Volvo Trucks. Si la firme de Göteborg travaille certes avec Daimler pour construire des moteurs fonctionnant à l’hydrogène, elle a également l’ambition que 50% des camions qu’elle vendra en 2030 seront électriques. En attendant, les autres 50% auront des moteurs thermiques. Certes très économes en carburant, à l’image de ceux qui disposent de la technologie Turbo Compound, mais toujours thermiques. Actuellement, la principale stratégie des constructeurs de camions semble être de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier. DAF a ainsi dévoilé l’année passée sa nouvelle gamme de camions XF, XG et XG+, tous dotés de moteurs thermiques, mais travaille également sur l’électromobilité. Le premier DAF électrique commercialisé en Suisse − et utilisé par Camion Transport (photo ci-dessous) − sera d’ailleurs présenté ce 3 mars à la presse. D’ici là, l’initiative populaire des Routiers Suisses aura fait son petit bout de chemin. Elle vient en effet d’être déposée à la Chancellerie fédérale pour une évaluation préliminaire et la récolte des 100000 signatures devrait commencer dans environ trois mois, estime le secrétaire général des Routiers Suisses (lire en page 2). Selon lui, derrière les récentes protestations des chauffeurs de camion canadiens et français se cachent les mêmes problèmes que chez nous: des salaires parfois très bas et un flagrant manque de considération. Avec leur initiative populaire, les Routiers Suisses protestent aussi. Ils le font cependant de manière constructive pour l’avenir de notre profession. Et si l’initiative aboutit, notre avenir s’annoncera certainement sous de meilleurs auspices. Laurent Missbauer, rédacteur en chef Impressum: SWISS CAMION, Route de la Chocolatière 26, 1026 Echandens. Tél.: 021 706 20 00, swisscamion@routiers.ch | Rédacteur en chef: Laurent Missbauer | Rédacteur: Daniel von Känel | Collaborateurs de la rédaction: Sarah Amat, Christian Llamera, Kéren Martin, Elvedin Mesic, David Piras, Hans-Peter Steiner et Erich Urweider | Annonces: Kéren Martin, kmartin@routiers.ch | Imprimerie: Vogt-Schild Druck SA, 4552 Derendingen, www.vsdruck.ch | Régie publicitaire: Les Routiers Suisses, La Chocolatière 26, 1026 Echandens. Tél.: 021 706 20 00, annonces@routiers.ch | Tirage contrôlé REMP: 17813 exemplaires (le plus grand tirage de la branche en Suisse) | Abonnement annuel: 75 francs | www.swisscamion.ch

2 CAMION 3 / 2022 Association Manifestations de routiers: nous protestons nous aussi, mais de manière constructive Au Canada, des chauffeurs de camions ont manifesté contre les mesures sanitaires: depuis le 15 janvier, les Etats-Unis et le Canada exigent une vaccination complète pour autoriser le passage de la frontière ou, à défaut, une quarantaine de plusieurs jours affectant également les chauffeurs. Al’exception d’une courte période, notamment en France et surtout en Angleterre, la circulation des poids lourds a pu avoir lieu presque sans entraves en Europe. L’accès aux bâtiments des douanes a certes dû se faire avec un masque et notre clientèle a parfois réagi de manière excessive au début de l’année 2020. De même, les restaurants ont dû être fermés dans de nombreux pays européens au cours de l’hiver 2020/2021. Mais nous sommes régulièrement intervenus en Suisse et, la plupart du temps, des solutions ont pu être trouvées. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) et l’Office fédéral des routes (Ofrou) ont fourni d’importants efforts afin d’adapter lesmesures de pandémie pour les chauffeurs. Nous avons également pu convaincre de nombreux clients de rouvrir leurs installations sanitaires. La population et les autorités étaient heureuses de voir que des chauffeurs travaillaient et que le papier toilette ainsi que la nourriture de première nécessité n’avaient pas déserté les rayons des magasins. L’image de la profession s’est de ce fait nettement améliorée: tout le monde sait désormais pourquoi les chauffeurs sont là et dans quel but ils effectuent leur travail. Des salaires équitables s.v.p.! Malgré cela, la profession de chauffeur peine à séduire la relève et celle-ci doit être recrutée la plupart du temps à l’étranger. Notre métier a pourtant la réputation d’être à la fois intéressant et exigeant. Cependant, certains employeurs estiment que les salaires permettant de vivre en Suisse sont encore trop élevés pour les chauffeurs. L’Astag, l’association qui regroupe les principaux transporteurs routiers de Suisse, est ainsi toujours d’avis qu’il n’est pas nécessaire d’instaurer un salaire minimum qui soit obligatoire et qui soit contrôlé. Nous ne voulons pas que les conditions de travail désastreuses qui prévalent dans les pays européens environnants arrivent chez nous! Nous ne voulons pas passer notre temps libre dans les cours des sociétés de logistique ou sur les parkings des stations-service. C’est pourtant ce qui risque d’arriver à bon nombre de chauffeurs quand ils ne dorment pas dans les logements qui sont mis à disposition par leur employeur et qui les coupent de toute la vie sociale qui les entoure. On n’est pas loin de se retrouver avec des situations jadis réservées aux travailleurs immigrés. Nous n’en sommes certes pas encore là mais, si nous ne nous défendons pas énergiquement, c’est ce qui finira par arriver. En cas de crise entraînant des restrictions pour les travailleurs immigrés et les «résidents hebdomadaires», la logistique s’effondrerait déjà aujourd’hui dans notre pays. L’armée ne peut en effet pas recruter suffisamment de chauffeurs et, même avec tous les intérimaires possibles, tels que les chauffeurs de car, nous n’y arriverions pas. Nous avons besoin d’une base solide de chauffeurs qui vivent en Suisse et qui soient présents même pendant les périodes difficiles. Pour cela, il faut cependant que le salaire soit suffisant pour vivre. Actuellement, nous estimons qu’un salaire minimum brut de 5000 francs par mois (13 fois par année) est nécessaire pour un emploi à plein temps. Récolter des signatures L’initiative des Routiers Suisses en faveur des chauffeurs a désormais été déposée à la Chancellerie fédérale pour une évaluation préliminaire. Nous pensons pouvoir commencer à récolter des signatures dans trois mois environ. Pour cela, nous avons besoin de chaque chauffeur indigène, de nationalité suisse, des membres de sa famille ainsi que des anciens chauffeurs, des retraités, des personnes travaillant sur les quais de chargement, etc. Nous devons récolter les signatures auprès de toutes les personnes concernées ainsi qu’auprès de leurs amis et de leurs connaissances. Nous protestons nous aussi mais de manière constructive, bien préparée, avec un objectif clair et pour défendre notre cause. Nous ne voulons pas énerver nos concitoyens sur la route. Notre image s’est certes constamment améliorée au cours de ces dernières années mais nous avons besoin d’encore plus de personnes qui nous soutiennent. Les systèmes politiques canadien et français fonctionnent probablement différemment et des mesures drastiques y sont nécessaires pour faire bouger les choses. On peut aussi supposer que les restrictions sanitaires ont été lagoutte d’eauqui a fait déborder le vase. Derrière cela se cachent les mêmes problèmes que chez nous: de longues semaines de travail, un salaire misérable, des employeurs guère disposés à ouvrir leurs bourses et des clients qui ne montrent aucune estime envers les chauffeurs de camion. En Amérique du Nord aussi, les camions ne brillent plus autant qu’avant. On voit bien qu’il ne reste plus beaucoup d’argent et que la fierté d’antan a disparu. Il n’est en effet pas rare d’y croiser des chauffeurs qui peinent à joindre les deux bouts. Une fois que l’examen préliminaire de notre initiative aura été effectué par la chancellerie, nous devrons nous atteler à la collecte des signatures vers le début du mois de mai. Si nous le faisons avec la même détermination que celle que nous mettrions à organiser une grève, nous ne tarderons pas à réunir toutes les signatures nécessaires. L’attention qui sera alors portée à nos revendications n’en sera que plus grande. Nous avons en effet besoin de soutien et non de l’hostilité qu’une grève ne manquerait pas de déclencher à notre égard. (David Piras) Dessin:Trinco Pour la réussite de notre initiative populaire en faveur des chauffeurs, nous avons besoin de soutien et non pas de l’hostilité qu’une grève ne manquerait pas de déclencher.

3 CAMION 3 / 2022 Avez-vous une protection juridique adéquate? De la gestion de la pression des pneus à la réduction des temps d’immobilisation WEBFLEET TPMS la solution de contrôle de pression des pneus - 24h/24, 7j/7 webfleet.com WEBFLEET TPMS, la solution de contrôle de pression des pneus, surveille la pression et la température des pneus en temps réel. Grâce à la gestion pneumatique préventive, les problèmes sont détectés avant qu’ils n’entraînent des réparations coûteuses ou des temps d’immobilisation. Réduisez vos coûts, améliorez la sécurité et favorisez la durabilité, tout en réduisant le risque de pannes. Let’s drive business. Further. 009 12:45 Available TRANSPORT 009 VEHICLE Axle 2. L1: Low pressure 8.8 bar 8.4 bar 8.4 bar 7.2 bar 8.3 bar 8.8 bar Lorsque l’on contracte une protection juridique, il faut réellement lire très attentivement les conditions générales d’assurance afin de bien comprendre ce qui est couvert en fonction des choix effectués. Rubrique juridique Comme vous le savez, notre assurance offre diverses protections juridiques. Les couvertures sont réellement variables, en fonction de vos choix de départ. Nous allons résumer brièvement les points qui reviennent le plus souvent et restons bien évidemment à votre disposition pour vous conseiller au mieux. Les membres actifs et apprentis sont couverts en protection juridique du travail, celle-ci est limitée au contrat de travail et aux litiges qui en découlent. La protection circulation doit être contractée séparément. En tant que chauffeur professionnel, une protection juridique circulation est essentielle et nous vous conseillons vivement de vous assurer que vous en avez une. Pour vous donner une idée, les cas de protection juridique circulation représentent environ 40% des cas qui occupent le service juridique des Routiers Suisses. Cela démontre bien la réelle importance de cette protection. La protection juridique circulation Ces derniersmois, nous avons eu plusieurs succès dans les divers cas en circulation. Cela nous a permis de minimiser au maximum les conséquences liées à un incident sur la route. Ce succès a été possible grâce à notre implication mais également au soutien fourni par les avocats mandatés dont les honoraires ont été indemnisés intégralement par la protection juridique. Etant donné les honoraires d’avocats, qui sont relativement élevés, la prime circulation de notre assurance, qui s’élève à 75 francs par année, vous permet d’être protégé à moindre coût. Une autre problématique qui revient souvent est celle des accidents, qu’ils soient professionnels ou non. Les différends relatifs à la Suva (Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents), ou aux autres assurances- accidents, sont couverts par la protection juridique privée et non par la protection du travail de base, ni par la protection juridique circulation. Dans le cadre d’un accident, le litige éventuel sera contre l’assurance-accidents sconcernée. C’est pour cette raison que, pour être couvert contre de tels cas, il faut avoir souscrit à la protection juridique privée. La protection jurdique privée Malheureusement, nous voyons de plus en plus de conflits de ce type et, la plupart du temps, il y a une action juridique possible de notre côté mais la couverture est nécessaire et, lorsqu’elle manque, cela limite nos possibilités d’action. D’expérience, nous constatons que les assurances refusent «par principe» les couvertures et qu’il est devenu d’usage de passer par un avocat pour obtenir gain de cause. Étant donné le risque inhérent au métier de chauffeur de poids lourds, qui reste un métier très physique qui requiert régulièrement des manipulations présentant un réel risque, lors du chargement de palettes ou en descendant tout simplement de votre camion, la protection juridique privée, pour un montant de 140 francs par année, vous couvre pour tout litige envers une assurance. (Sarah Amat)

4 CAMION 3 / 2022 Quelles nouveautés au sujet de la procédure accélérée à la suite de la saisie du permis? Le projet de loi a étémis sur pied dans le but d’avoir une procédure plus rapide lors d’un retrait préventif. C’est du moins ce que prévoit, entre autres, ce projet de loi dont la mise en consultation s’est terminée le 11 août 2021. Nous avons déjà traité la seconde partie du projet qui concerne l’assouplissement des règles sur le retrait de permis pour les chauffeurs professionnels. Nous lui avions consacré un article qui avait été publié dans l’édition 1/2020 de SWISS CAMION et que vous pouvez Le service juridique des Routiers Suisses aborde ici la thématique de la procédure accélérée à la suite de la saisie du permis. Quelles sont les nouveautés que propose d’apporter le projet de loi dont la mise en consultation a récemment pris fin? toujours consulter sur notre site*. Nous allons donc nous concentrer cette fois-ci sur la partie traitant du retrait préventif. Quels en sont les points principaux? Lors de la saisie d’un permis par la police, l’autorité chargée des retraits de permis devra statuer sur le retrait préventif dans un délai de dix jours ouvrés. Pour ce faire, la police devra elle-même transmettre ses observations ainsi que le dossier à l’autorité en charge dans les trois jours dès la saisie du permis. Si l’autorité ne peut pas prendre position, par exemple parce qu’elle est dans l’attente de résultats toxicologiques, alors elle devra restituer le permis à son titulaire. Bien entendu, si les résultats reviennent par la suite positifs et établissent des doutes suffisamment sérieux sur l’aptitude à la conduite de la personne concernée, alors elle pourra à nouveau lui retirer le permis à titre préventif. Lorsque l’autorité cantonale prononcera un retrait du permis à titre préventif, elle devra alors réévaluer sa décision tous les trois mois, à la demande de la personne concernée. L’idée principale derrière cette modification est d’établir une procédure, à la fois plus rapide et plus transparente, dans laquelle les personnes encourant un retrait pourraient mieux faire valoir leurs droits. Par exemple, la personne qui se voit retirer le permis à titre préventif pourrait, durant le délai de dix jours, produire des pièces afin de dissiper les doutes quant à son aptitude. (Sarah Amat) * www.swisscamion.ch/fr/article/il-esttemps-denterrer-la-double-sanction-retraitdu-permis-retrait-du-droit-de-travailler/ Rubrique juridique L’idée principale derrière la modification de la loi, dont la mise en consultation s’est terminée le 11 août 2021, est d’établir une procédure, à la fois plus rapide et plus transparente, dans laquelle les personnes encourant un retrait auraient davantage de possibilités de faire valoir leurs droits. Dessin:Trinco Route de la Chocolatière 26, 1026 Echandens / Tél. 021 706 20 00 - www.routiers.ch

5 CAMION 3 / 2022 Une vidéo peut-elle prouver que vous avez déposé votre recours dans les délais impartis? Dans cet article, nous allons nous interroger sur une pratique courante du Tribunal fédéral récemment remise en question. L’envoi d’une vidéo comme preuve du dépôt dans les temps impartis d’un recours est-il valable ou non? L’acte doit être remis le dernier jour du délai à minuit et la preuve du dépôt incombe à la partie, respectivement à son avocat. Généralement, la date du dépôt doit correspondre avec la date du sceau postal. Si tel n’est pas le cas, alors il est possible d’amener des moyens de preuves appropriées pour prouver le dépôt. Ces moyens de preuves doivent être amenés à l’autorité judiciaire spontanément et avant l’échéance du délai L’envoi d’une vidéo prouvant qu’un recours a bel et bien été déposé dans les délais impartis est-il valable? Notre service juridique vous répond. de recours. Un moyen accepté serait de faire référence aux preuves, à la vidéo donc, soit dans le recours, soit sur l’enveloppe contenant le recours ou encore dans ses annexes. La vidéo a-t-elle été manipulée? La preuve amenée par vidéo est une pratique courante et acceptée depuis longtemps mais, depuis peu, le Tribunal fédéral la remet en question et s’interroge à son sujet. L’enveloppe que l’on voit sur la vidéo contient-elle bien le recours? La vidéomontrant lamise sous pli, le dépôt de l’acte, la date et l’heure a-t-elle été réalisée sans interruption et sans utilisation de techniques de manipulation d’images? Les indicateurs temporels sont-ils fiables? S’il y a eu des montages, est-il possible de le déceler et quels en seraient les coûts? Malgré la remise en question de cette pratique établie, le Tribunal fédéral ne renverse pas sa manière de faire et continuera, pour le moment, à considérer la preuve de dépôt apportée par vidéo comme valable. Elle reconnaît cependant que cette pratique est propre à engendrer des frais judiciaires supplémentaires considérés comme «causés inutilement» et qui doivent être mis à la charge de celui qui les a engendrés. (Sarah Amat) Admise jusqu’ici, la preuve apportée par une vidéo a été remise en question par le Tribunal fédéral. Dessin:Trinco En route pour un avenir plus vert. Au cours des 150 dernières années, nous avons réinventé la roue chaque jour, pour la rendre encore plus parfaite. Nous offrons des solutions d’avenir pour une meilleure durabilité. Des innovations pour tous, développées pour vous. 2022_CO_LKW_zukunft_210x148mm_F.indd 1 17.02.22 16:43

6 CAMION 3 / 2022 Quelle influence la crise sanitaire a-t-elle eu sur la vente de nouveaux camions en Suisse? Quelle a été la demande de véhicules neufs au cours de ces deux dernières années pour les camions? Renault Trucks: Après une forte baisse au premier semestre 2020, nous avons pu constater un net regain de dynamisme au second semestre 2/2020. Cette forte demande s’est maintenue tout au long de l’année 2021. MAN: Alors que la demande était plutôt sur la réserve en 2020, elle a fortement augmenté à partir demars 2021. Scania: Lademandea continuéàêtre très élevéeau cours de ces deux années. Ce n’est que brièvement, juste après le début de la pandémie, qu’il y a eu une certaine réticence à effectuer des investissements importants. La crise sanitaire a engendré et continue d’engendrer plusieurs défis sur les chaînes de montage. Ces derniers ne seront bientôt plus d’actualité. 2023 et surout 2024 s’annoncent sous de bons auspices. Photo: RenaultTrucks Au cours de ces deux dernières années, la crise sanitaire a laissé passablement de traces chez les constructeurs. Cela tant sur le plan de la production que sur celui de la livraison.Dans quelle mesure cette crise a-t-elle a perturbé la livraison de nouveaux camions en Suisse?Voici les réponses que nous avons recueillies auprès des importateurs Mercedes-Benz,MAN, Scania,VolvoTrucks, Renault Trucks, DAF et Iveco. Mercedes-Benz: La demande n’a pas beaucoup varié. Nous avons été étonnés que le changement declassification liéeà laRPLPn’ait pas engendré davantage de commandes. Iveco: La demande n’a pas beaucoup varié chez nous non plus. DAF: Malgré la crise sanitaire, nous avons enregistré une forte demande au cours de ces deux années. Volvo Trucks: La demande s’est maintenue à un bon niveau au cours de ces deux années. Noussommesmême trèssatisfaitsdes chiffres de vente pour 2021. Si nous avons traversé la pandémie sans trop de dégâts, c’est d’abord grâce à notre vaste gamme de produits innovants. Encequi concerne lesmodesdepropulsion, nos clients ont en effet le choix entre le diesel, l’électrique, le GNL (gaz naturel liquéfié) et leHVO, un carburant àbased’huile végétale hydrogénée. En ce qui concerne les camions électriques, nous sommes les leaders dumarché, tant en Suisse qu’en Europe. La deuxième raison de nos bons chiffres de vente est notre gamme I-Save qui permet à nos clients d’économiser aumoins 10%de carburant. Il s’agit là d’un argument de poids, surtout dans une périodede fortepressionsur lescoûts.Denombreux clients nous ont même annoncé avoir réalisé une économie largement supérieure à 10%! Avez-vous rencontré des problèmes de livraison au cours de ces deux dernières années, et si oui, pourquoi? Renault Trucks: En raison du coronavirus, les usines ont été partiellement fermées au cours de ces deux dernières années. Parfois, c’est également le manque de disponibilité de certains composantsqui aeuune influencenégative sur le flux de production. MAN: En 2020, année de pandémiemarquée par de nombreux confinements dans toute l’Europe, les infections des collaborateurs sur les sites de production et donc l’arrêt d’une ou de plusieurs équipes de travail ont constitué la principale difficulté. En 2021, les problèmes de l’industrie internationale de sous-traitance ont fortementaugmentéalorsque lacrisesanitaire n’engendrait pratiquement plus aucun arrêt des chaînes de production. Scania: Comme tous les constructeurs, nous avons eu nos défis à relever. Certains ont conduit à des réductions de l’horaire de travail, voire à des fermetures temporaires d’usines. Du point de vue de Scania, cela n’avait aucun sens de produire des véhicules qui ne pouvaientpasêtreterminésenraisond’unmanque de pièces et qui devaient ensuite être garés provisoirement à l’extérieur. Heureusement, cette situation ne concernait pas seulement Scaniamais tous les constructeurs. Mercedes-Benz: La capacité de livraison durant cette période exceptionnelle était en fait trèsbonne. Biensûr, il yaeuquelques camions qui sont arrivés un peu plus tard que prévu, mais d’autres sont aussi arrivés plus tôt. Cela dépandait de la disponibilité des composants. DAF: Oui, en raison d’absences de personnel duesà l’épidémiede coronavirus chez les fournisseurs et aumanque de disponibilité de certaines pièces. Néanmoins, nous n’avons pas encoreconnuunarrêt de laproduction. Et nous n’en prévoyons pas pour le moment. Malgré Sondage

7 CAMION 3 / 2022 cela, les délais de livraison sont actuellement plus longsquenous le souhaiterions, cequi est aussi dû au grand intérêt suscité par les modèles de notre nouvelle gamme XF, XG et XG+. Volvo Trucks: Oui, comme tout lemonde. Nous avons dû relever plusieurs défis en ce qui concerne les chaînes d’approvisionnement. Quelles étaient exactement les pièces qui vous manquaient? S’agissait-il exclusivement de produits dits semi-conducteurs ou d’autres composants importants comme l’acier, lesproduitsenplastiqueou lespneus? Renault Trucks: En principe, le manque de semi-conducteurs était et reste la principale causedesdifficultésde livraison. Denombreux composants mécaniques (moteurs, transmissions, électronique) des camions sont influencés par ces dispositifs de commande électriques. Ceux-ci ont besoin eux-aussi des semi-conducteurs. MAN: Il manquait à différents moments des composants très différents pour la production. Mais le problème principal était et reste la disponibilité des semi-conducteurs. Scania: Il n’est pas facile de répondre à cette question de manière détaillée car ce sont toujours d’autres pièces ou composants qui ont entravé laproductionnormaledenoscamions. Mercedes-Benz: Celaaété lecaspour toute la gamme en fonction de la manière et de l’endroit où les fournisseurs ont été touchés par la pandémie dans leurs usines de production. DAF: Comme pour l’ensemble du secteur, la disponibilité des pièces et des puces informatiques reste un défi pour DAF. Volvo Trucks: Oui, comme nous l’avons déjà mentionné, nous avons dû faire face aux mêmes défis enmatièrede chaînes d’approvisionnement que l’ensemble du secteur. Quelle a été la réaction de vos clients? Renault Trucks: Nous avons constaté une grande satisfaction de la part de nos clients lorsque nous leur avons proposé des solutions Volvo Trucks a traversé la crise sanitaire sans trop de dégâts. «Nous avons même été très satisfaits de nos ventes en 2021. Cela grâce notamment à nos nouveaux camions», nous a confié la marque suédoise. Photo:VolvoTrucks variées et individuelles. Les clients ont également manifesté une grande compréhension de la problématique car celle-ci est aussi perceptibledansdenombreusesautresbranches. MAN: Dans la plupart des cas, nos clients ont fait preuve de compréhension, ce dont nous leur sommes d’ailleurs très reconnaissants. Scania: Etant donné que notre branche n’était pas la seule à être touchée, nos clients ont été très compréhensifs. Mercedes-Benz: Ils ont été trèspragmatiques. Nouspartonsduprincipequ’ilsonteux-mêmes été confrontés à des situations similaires. DAF: Nous avons enregistrédifférents types de réactions, allant du client compréhensif à celui qui trouvait cela inacceptable. Volvo Trucks: Nos clients ont réagi en faisant preuve de compréhension. Cela s’explique d’une part par le fait qu’ils sont conscients des problèmes affectant la chaîne d’approvisionnement mondiale. La plupart des secteurs industriels sont concernés. D’autre part, nous investissons beaucoup de temps dans l’entretien de relations de confiance avec nos clients. Cela s’avèreparticulièrement payant dans une situation aussi difficile. Comment avez-vous géré cette situation? Renault Trucks: Grâce à une communication précoceet transparenteavec lesclients. Parfois, en cas d’écarts importants par rapport aux délais de construction initiaux, des solutions alternatives ont été proposées. MAN: En faisant preuved’honnêteté envers les clients et en élaborant une planification plus précoce pour les clients. Scania: L’usine a été très active dans la recherche de fournisseurs de remplacement capables de livrer les pièces ou composants manquants dans la qualité exigée par Scania, ce qui n’a pas été facile en raison du manque dematières premières. Lorsque cela était justiLes micro-puces (photo ci-contre) sont les éléments centraux de tous les appareils numériques. De telles puces particulièrement performantes sont également indispensables sur les chaînes de construction des automobiles et des camions. Ces puces sont composées d’un nombre infini de semi-conducteurs très fins dont le matériau de fabrication principal est le silicium, appelé également le sable de quartz. Ce matériau ne conduit que peu de courant. Si l’on combine différentes couches de semi-conducteurs, on obtient des transistors dont on peut influencer la conductivité: ils laissent alors passer le courant, ou non. La combinaison de plusieurs puces donne des processeurs qui assurent des tâches centrales de calcul et de commande, par exemple dans les ordinateurs. Depuis 2020, la demande de telles puces est si forte que certains constructeurs, par exemple ceux du groupe Volkswagen, ont dû temporairement arrêter leur production. Les fabricants n’ont pas pu et ne peuvent pas fournir suffisamment de puces pour diverses raisons, par exemple en raison de chaînes d’approvisionnement très sollicitées. C’est Taïwan qui domine le marché mondial de la fabrication de ces puces. (hps) L’arrêt des chaînes de production a été causé par la pénurie des semi-conducteurs

8 CAMION 3 / 2022 Le prix des matières premières nécessaires à l’assemblage des camions a augmenté ces derniers mois et cette augmentation a bien entendu dû être répercutée sur les prix de vente. fié pour des raisons de sécurité, les véhicules présentant des piècesmanquantes ont tout de même été construits, toujours dans le but de pouvoir livrer et de monter ensuite les pièces manquantes avant la livraison au client. En effet, chez nous en Suisse, il faut parfois des semaines, voire des mois, pour qu’un véhicule soit entièrement monté et livré à son propriétaire. Certains retards de livraison ont ainsi pu être réduits auminimum. Volvo Trucks: Notre usine a pris différentes mesures afin d’accélérer au maximum les livraisons. En revanche, en tant qu’organisation de vente en Suisse, nous n’avions guère de margedemanœuvre. Dans une telle situation, il est particulièrement important de fairepreuve de transparence vis-à-vis des clients. Que ce soit lors des entretiens de vente ou après la conclusion des contrats, lorsque les livraisons sont retardéesmalgré tous nos efforts. La pandémie a-t-elle entraîné un arrêt ou un report des commandes? Renault Trucks: Non, au contraire, les clients ont désormais avancé leur planning pour faire face à l’allongement des délais de livraison. MAN: Nous n’avons pas connu de retard de commande à proprement parler. Les clients, conscients des difficultés de livraison ont eu tendance à commander plus tôt que par le passé. Scania: En tout cas, notre carnet de commandes est encore bien rempli et les délais de livraison des nouvelles commandes ont augmenté. Ceux-ci sont actuellement très longs pour nous et le client abesoinde camionspour pouvoir satisfaire à son tour sa clientèle. Mercedes-Benz: Non, chez l’un ou l’autre de nosclients, l’enviedeprendreunedécisions’est avérée un peu plusmodérée. Iveco: Oui, clairement. En 2020 et en 2021, des projets d’investissement ont été reportés en raison d’incertitudes dans le secteur d’activité desclientsetunrisquededéfaillanceplusélevé a été accepté. Pour répondre à la demande, le marchédesvéhiculesd’occasionaété littéralement pris d’assaut. DAF: Oui, on ne peut pas le nier. Volvo Trucks: Certains de nos clients ont malheureusement été durement touchés par lapandémie, ce qui les a conduits, demanière compréhensible, à reporter dans un premier temps leur commande de nouveaux camions. Cet effet a été partiellement compensé par le fait que, chez d’autres clients, le volume de transports a énormément augmenté pendant la pandémie et qu’ils ont eu besoin de plus de véhicules à court terme. Il ne fait aucun doute que tous les acteurs du secteur seront heureux de voir la situation se normaliser. Quelles sont vos attentes pour le marché suisse au cours de ces prochaines années? Renault Trucks: Nous nous attendons toujours à un excédent de la demande par rapport aux capacités de production en 2023 et prévoyons une certaine normalisation de nos activités au plus tôt en 2024, ce qui nous permettra de réduire à nouveau les délais de livraison. MAN: Les prévisions conjoncturelles sont bonnes, tant pour 2022 que pour 2023. Grâce aux carnets de commandes bien remplis et aux excédents de l’année dernière, le volume du marché augmentera et se stabilisera pendant le premier et le deuxième trimestres de 2023 pour revenir à une année normale qui pourra être considérée comme bonne. Scania: Nous verrons comment l’approvisionnement mondial évoluera pendant les prochains mois. Nul ne peut cependant prédire l’avenir avec précision avec le contexte actuel. Mercedes-Benz: Ces dernières années, le marché suisse a eu besoin en moyenne d’environ3700unités, parfoisunpeumoins, parfois un peu plus. Mais cela finira par s’équilibrer. Iveco: Nous nous attendons à une croissance réelle dumarché dans toutes les catégories en raison de l’évolution de la consommation, de l’importanceaccruede la livraisonsur ledernier kilomètre et également en raison d’une demande plus élevée dans le volume total. VolvoTrucks: Nouscomptonssuruneévolution positivede l’économiesuisse.Nousnousattendons toutefois à de nets changements au niveau des systèmes de propulsion. La demande de camions électriques ou équipés d’autres propulsions alternatives ne cessera d’augmenter. Ceci dit, les camions diesel continueront à avoir leur raison d’être pendant encore de nombreuses années pour certaines applications. Comme nous sommes très bien placés dans chacun de ces deux domaines, nous restons confiants pour l’avenir. Quel a été l’impact de la crise sur les prix? Renault Trucks: Les coûts d’approvisionnement massivement plus élevés des chaînes d’approvisionnement mondiales ont malheureusement aussi eu un effet négatif sur le prix du produit final. MAN: Lesprix, etdonc l’inflationqui endécoule, ont augmenté principalement en raison de la reprise économique qui est étonnamment rapide dans presque tous les domaines de la vieoudesaffaires.D’unemanièregénérale, les matières premières et l’énergie sont devenues très rapidement plus chères dans toute l’Europe. La pénurie chez les fournisseurs a également entraîné une forte augmentation des coûtsunitairesdeproduction. Denotrepoint de vue, il ne fautmalheureusement pas s’attendre à ce que cela change beaucoup dans un proche avenir. Scania: Lapénuriedematièrespremièresetde capacités de transport a aussi entraîné une hausse des prix de nos produits. Pratiquement toutes les branches ont dû procéder à des adaptations de prix. Mercedes-Benz: Ici aussi, la situation est identique à celle d’autres secteurs. Si les prix des matières premières augmentent, cela se répercuteraun jourou l’autreégalement sur les consommateurs. Iveco: Cela n’a pas eu d’impact direct chez nous. La pandémie a entraîné d’importants changements sur le marché. En raison de la perturbation de la structure de l’offre et de la demande ainsi que de nombreux programmes d’investissement des gouvernements, les marchés ont fortement augmenté en2021etontentraînéunepénuriedematières premières, ce qui a influencé leur prix. Cette hausse du marché des matières premières influence la structure des prix et la disponibilité desproduitsfiniset semi-finis. Lesprixdesvéhicules et des pièces détachées ont par conséquent augmenté ces six derniersmois. Volvo Trucks: En raison du renchérissement mondial des matières premières et des transports, nous devons envisager des augmentations de prix. (Hans-Peter Steiner) Photo: Mercedes-Benz Sondage

9 CAMION 3 / 2022 Notre initiative, bien relayée dans la presse, aborde aussi la problématique du cabotage Les médias ont bien relevé les requêtes de l’initiative des Routiers Suisses.Celleci exige notamment de meilleurs salaires pour les chauffeurs et davantage de moyens pour lutter contre le cabotage. Actualités L’initiative populaire des Routiers Suisses, qui vise à protéger la profession de chauffeur en Suisse, a été bien relayée dans la presse, tant alémanique que romande. Blick et 24 Heures ont par exemple relaté qu’il fallait mettre un terme aux bas salaires. Ceux-ci ne peuvent en effet convenir qu’à des chauffeurs étrangers, notamment des pays de l’Est, qui empêchent les chauffeurs suisses d’exercer leur métier en recevant un salaire équitable. «Des bas salaires qui font peur!» «L’idéal serait de s’aligner sur les autres métiers manuels, soit d’espérer un montant s’élevant à 5000–5500 francs par mois. Or des chauffeurs étrangers acceptent des salaires de 3600 francs, une somme qui ne permet tout simplement pas de couvrir le coût de la vie en Suisse. Cela fait peur», déplore David Piras, le secrétaire général des Routiers Suisses, interviewé dans 24 Heures. Ce quotidien relève également que «l’initiative des Routiers Suisses souligne la nécessité d’appliquer correctement l’interdiction du cabotage», à savoir les transports effectués par des camions étrangers, d’un point A à un point B, à l’intérieur des frontières suisses. Il s’agit d’un véritable problème. On en veut pour preuve les contrôles effectués l’année passée par la police valaisanne. Les quatre cas suivants de cabotage y avaient été relevés: 1. Le 23 janvier 2021, un autocar français a transporté 24 passagers de Genève à Nendaz (VS). 2. Le 26 février 2021, un camion slovaque a transporté des marchandises entre Egerkingen (SO) et Granges (VS). 3. Le 12 mai 2021, un camion serbe transportait des voitures d’occasion entre Montana (VS) et Aarau. 4. Le 7 juillet 2021, un camion italien a effectué un transport interne entre Les Crosets (VS) et Martigny (VS). Dans les quatre cas, une garantie d’amende de 4120 francs a été encaissée. «Il faut que cela change!» Les Routiers Suisses sont convaincus qu’il ne s’agit là que de la pointe de l’iceberg. Pour quatre infractions constatées, combien d’autres cas non sanctionnés? Il faut que cela change et c’est l’un des buts de l’initiative des Routiers Suisses. Ces transports effectués à l’intérieur de nos frontières par des camions immatriculés à l’étranger menacent gravement notre profession. (Laurent Missbauer) Captures d’écran: Blick.ch et 24heures.ch La presse, tant alémanique que romande, a bien relayé les requêtes de l’initiative des Routiers Suisses. Celle-ci exige notamment de meilleurs salaires et plus de moyens pour lutter contre le cabotage. Les cas de cabotage sont très fréquents. La police valaisanne a amendé en 2021 un autocar français ainsi que trois camions provenant de Slovaquie, de Serbie et d’Italie.

10 CAMION 3 / 2022 Série «Jeunes chauffeurs» «J’adore mon métier» Il fait encore nuit sur le site de l’entreprise de recyclage Leisibach, à Hochdorf (LU), mais on y remarque tout demême deux couleurs marquantes: l’orange et le jaune. En effet, tous les camions de Leisibach sont peints en orange, alors que les bennes sont jaunes. C’est là que commence vraiment la journée de travail de Philipp Hankh. Il choisit une benne à couvercle vide et la hisse sur son Scania: «Nous allons maintenant à Auw, dans le canton d’Argovie, où nous changerons de benne avant de retourner à Hochdorf. Puis nous irons chercher une benne de déchets et nous nous rendrons auprès de la société Renergia à Perlen, dans le canton de Lucerne», nous explique-t-il. Un travail très varié Pour prendre connaissance de ces deux premières missions, Philipp Hankh a consulté son téléphone portable. Un clic sur la mission et l’itinéraire s’affiche immédiatement et il n’est plus nécessaire de programmer le GPS. Au pied du mont Pilate: Philipp Hankh récupère une benne pleine de contreplaqué sur le chantier du célèbre train à crémaillère du Pilate. Photos: Daniel von Känel Philipp Hankh (28 ans) parcourt toute la Suisse centrale au volant de son camion. Il se rend parfois également dans le canton d’Argovie ou à Zurich et adore tellement son métier qu’il n’envisagerait même pas un seul instant d’en exercer un autre! A l’aube, sur le site de Leisibach: notre jeune chauffeur est sur le point de charger sur son camion la première benne de la journée. Il la transportera à Auw, dans le canton d’Argovie. Pour les premiers trajets de cette nouvelle journée de travail, il n’aurait cependant pas eu besoin de l’aide du GPS! En effet, ce chauffeur, qui habite Beromünster (LU) et qui a grandi à Büttikon (AG), connaît la région comme sa poche. «Je me déplace surtout en Suisse centrale», explique-t-il. «Parfois, je vais aussi dans le canton d’Argovie ou à Zurich». Cela signifie qu’il lui arrive de parcourir de longues distances pour procéder à l’échange d’une benne. «C’est justement cette variété qui me plaît», nous confie-t-il. La localité d’Auw est rapidement atteinte et Philipp Hankh remplace la benne vide qui se trouve sur son véhicule par une benne remplie de PET. Sur la benne vide, il appose encore une étiquette avec la mention PET afin que l’utilisation prévue soit bien visible pour tous. Il retourne ensuite à Hochdorf et continue sa route en direction d’une décharge. Là, il y remplit une benne avec laquelle il se

11 CAMION 3 / 2022 Leisibach Entsorgung, sise à Hochdorf dans le canton de Lucerne, a été fondée en 1981. Cette entreprise familiale, dirigée aujourd’hui par la deuxième génération, est spécialisée dans l’élimination des déchets ainsi que dans leur recyclage. Elle compte une centaine de collaborateurs ainsi qu’une flotte de plus de 50 camions. (dvk) L’employeur Philipp Hankh est âgé de 28 ans. Il a suivi un apprentissage de conducteur de véhicules lourds avec Certificat fédéral de capacité (CFC) car il a toujours su qu’il voulait devenir chauffeur. Pendant son temps libre, il s’occupe de ses trains miniatures. (dvk) Le chauffeur Notre jeune chauffeur est très heureux de son métier. Cela même s’il doit parfois composer avec le comportement irresponsable de certains automobilistes ou cyclistes. Le bulletin de livraison est immédiatement scanné sur le téléphone portable. Philipp Hankh ne passe pas toutes ses journées derrière le volant. Chez Leisibach, il est en effet souvent appelé à descendre de sa cabine afin de charger différentes bennes. Photos: Daniel von Känel rend auprès de la société Renergia à Perlen (LU). Celle-ci n’est pas seulement responsable du recyclage des déchets de Suisse centrale mais elle fournit également de la vapeur industrielle à l’usine Perlen Papier AG, de l’eau chaude aux réseaux de chauffage à distance de Rontal et d’Emmen/Lucerne ainsi que de l’électricité à des milliers de foyers. L’ensemble du site est donc immense. Le chauffeur s’annonce à l’entrée et se voit attribuer un numéro. «Parfois, il faut patienter un peu plus longtemps. Par exemple quand il y a beaucoup de camions qui attendent de décharger leur marchandise», explique-t-il. Mais aujourd’hui, seules deux petites minutes s’écoulent avant que le numéro attribué et le lieu de déchargement apparaissent sur un panneau d’affichage. Philipp Hankh se rend alors dans une halle pour vider sa benne. Pour cela aussi, il doit descendrede son camion. «C’est comme ça que cela se passe avec ce genre de transports», rigole-t-il. «On monte et on descend très souvent. On bouge donc tout le temps. J’aime beaucoup conduire mais un peu de mouvement ne fait pas de mal!» Dans les camions depuis son enfance Phlipp Hankh a effectué un apprentissage de conducteur de véhicules lourds avec CFC. Et c’est tout sauf un hasard: «Tout petit déjà, j’étais souvent assis dans la cabine d’un camion», raconte-t-il. «J’avais souvent le droit de monter dans le camion de mon papa.» Son père Urs Hankh est lui aussi un chauffeur membre des Routiers Suisses. Au sein de l’entreprise Häfeli à Lenzbourg, il conduit un camion à bennes interchangeables, tout comme son fils aujourd’hui. «Il n’y a jamais eu d’autre option pour moi, j’ai toujours voulu être chauffeur.» Il a d’abord conduit des semi-remorques et, pendant un certain temps, il a aussi roulé en Allemagne. Mais il a fait une très mauvaise expérience chez son employeur de l’époque. Soudain, son salaire n’a plus été versé. Son chef l’a alors rassuré en lui disant qu’il y avait sans doute une raison d’ordre technique à l’origine de ce problème et que tout allait rapidement rentrer dans l’ordre. Jusqu’à ce que l’entreprise fasse finalement faillite et ferme définitivement ses portes. Une expérience qui lui a appris certaines choses. Par exemple, qu’un beau camion ne fait pas forcément tout: «j’avais un superbe Scania et comme je suis un inconditionnel de cette marque, cela m’a naturellement beaucoup plu», préciset-il. «Seulement, cela ne sert à rien si, à la fin, on n’a plus de salaire et plus de travail!»

12 CAMION 3 / 2022 Les bennes interchangeables doivent toujours être soigneusement nettoyées. Chauffeurs de père en fils: Philipp Hankh, ici avec son père Urs, sont tous les deux des conducteurs de véhicules lourds membres des Routiers Suisses. Photo: Daniel von Känel Photo: DR Outre le fait qu’il conduit aussi un Scania chez Leisibach, il y a plusieurs raisons pour lesquelles il préfère son travail actuel, qu’il exerce depuis quatre ans, aux transports internationaux. «J’effectuais plusieurs jours d’affilée et mes journées étaient vraiment très longues», explique-t-il. Parfois, c’était simplement parce qu’il avait été placé sur des aires d’attente bondées, occupées la plupart du temps par des chauffeurs d’Europe de l’Est. «C’est vraiment grave ce qui s’y passe», déplore-t-il. Du coup, il soutient l’initiative populaire des Routiers Suisses en faveur des chauffeurs afin que la situation en Suisse ne devienne pas aussi dramatique qu’au sein de l’UE et qu’elle s’améliore. Avoir une vie privée n’était presque plus possible non plus. Aujourd’hui, il peut mieux estimer l’heure à laquelle il termine sa journée. Et, surtout, il peut rentrer chez lui après avoir terminé sa tournée. Car Philipp Hankh n’est pas seulement un chauffeur passionné mais aussi un constructeur de trains miniatures à la maison: «Je suis ainsi très content d’avoir du temps pour mon hobby et, bien sûr, pour ma partenaire.» Savoir rester calme L’après-midi, Philipp Hankh se rend à Alpnachstad. Là, au pied du Pilate, il décharge la benne vide et charge la benne remplie de contreplaqué. Après l’avoir vidée à Hochdorf, la dernière mission de la journée le conduit près de Brugg (AG). Il peut désormais parcourir une longue distance avant de devoir descendre de sa cabine pour changer de benne. Il ne se laisse pas gâcher le plaisir d’effectuer ces trajets un peu plus longs par des manœuvres téméraires d’automobilistes qui tiennent à tout prix à dépasser un camion. «Ceux qui roulent avec des vélos électriques rapides se comportent parfois aussi très mal. Beaucoup d’entre eux n’appliquent pas les règles de sécurité les plus élémentaires. Ils traversent les carrefours sans regarder autour d’eux. Cela même s’ils n’ont pas la priorité», regrette-t-il. Selon lui, cela vaut aussi pour de nombreux cyclistes circulant avec des vélos dits normaux. Et la preuve de ce qu’il affirme ne se fait pas attendre. Devant un feu rouge placé à proximité d’un chantier, une cycliste dépasse la colonne par la droite avant de tourner à gauche au feu, en traversant la voie opposée. On n’ose imaginer ce qui se serait passé si une voiture était arrivée correctement en sens inverse à cet endroit dépourvu de visibilité. «Rester toujours calme», telle est la devise de Philipp Hankh dans de telles situations. «Toute autre attitude ne servirait à rien.» Finalement, malgré cela, il a trouvé depuis longtemps la profession de ses rêves et prend toujours beaucoup de plaisir à effectuer son travail. (Daniel von Känel) Série «Jeunes chauffeurs»

13 CAMION 3 / 2022 Politique routière 8,4 milliards pour les autoroutes et les aires de stationnement pour les poids lourds Ce plafond de 8,4 milliards de francs servira notamment «à moderniser et à harmoniser des équipements d’exploitation et de sécurité, ainsi que l’aménagement d’installations de gestion du trafic, de stations de recharge rapide pour les voitures électriques, de centres de contrôle du trafic lourd et d’aires de stationnement pour les poids lourds», a indiqué le Conseil fédéral. S’y ajoutent la garantie du service hivernal, l’entretien des bermes centrales et des talus ainsi que le nettoyage Routes nationales: une partie des 8,4 milliards de francs que le Conseil fédéral entend dépenser de 2024 à 2027 serviront également à améliorer le quotidien des chauffeurs de camions. L’objectif est en effet de créer 21 nouvelles aires de stationnnement pour les poids lourds. Photo: Daniel von Känel Le Conseil fédéral a fixé le plafond de dépenses pour l’exploitation, l’entretien et les adaptations des routes nationales pour la période allant de 2024 à 2027. Il s’élève à 8,4 milliards de francs, et des places de stationnement pour les poids lourds doivent également être aménagées dans le cadre de ces dépenses. QUALITÉ SUISSE DEPUIS 1880. M I D L A N D . C H des conduites d’évacuation des eaux et des aires de repos. Ces moyens financiers servent en outre à poursuivre les mesures destinées à l’amélioration de la sécurité routière et à la protection de l’environnement. Améliorer le quotidien des chauffeurs L’aménagement de places de stationnement pour les poids lourds constitue une urgence. Si celles-ci sont mentionnées dans l’énumération du Conseil fédéral, c’est parce que le «concept pour les places de stationnement le long des routes nationales» a été adopté en 2011. A l’époque, il y avait cinq aires de stationnement aménagées le long des axes principaux. L’année dernière, une sixième place de stationnement a été ajoutée sur l’aire de repos de Forrenberg Nord (cf. SWISS CAMION 1/2021). L’objectif est toutefois de créer 21 nouvelles aires de stationnement pour les camions. Afin d’améliorer les conditions de travail des chauffeurs suisses, il est important que les places prévues soient réalisées le plus rapidement possible. Le Conseil fédéral veut intégrer cinq projets prêts à être réalisés dans l’étape d’aménagement 2023. Pour cela, il demande au Parlement de libérer une enveloppe de 4,3 milliards de francs. Il s’agit de l’élargissement de l’autoroute A1 dans la région de Berne, sur les tronçons situés entre les ramifications de Wankdorf et de Schönbühl, ainsi qu’entre Schönbühl et Kirchberg. En outre, la construction d’un troisième tube au tunnel de Rosenberg à Saint-Gall et au tunnel du Rhin sur l’autoroute A2 à Bâle, ainsi que la mise à disposition d’un second tube au tunnel de Fäsenstaub à Schaffhouse, doivent également être intégrées dans cette «étape d’aménagement 2023». (Daniel von Känel)

RkJQdWJsaXNoZXIy MjYwNzMx