Ce n’est pas la première fois que les véhicules limités à 45 km/h retiennent notre attention. En zone rurale, mais aussi à proximité des villes, les véhicules limités à 45 km/h en raison de leurs caractéristiques techniques causent de plus en plus fréquemment des perturbations du trafic: bien souvent, la circulation serait fluide si un camion roulant à 45 km/h ne bloquait pas la tête du convoi.
Pour quelle raison un propriétaire de véhicule limite-t-il la vitesse de son camion à 45 km/h? Le fait de ne pas payer la RPLP permet de réaliser des économies considérables pour le propriétaire d’un camion de 40 tonnes. S’il roule à plus de 45 km/h et parcourt environ 200 kilomètres par jour, un véhicule Euro 6 génère 43 976 francs de frais annuels. S’il ne s’agit pas d’un véhicule Euro 6, le montant s’élève même à 59 984 francs. Avec une limitation à 45 km/h, cela ne coûte que 4400 francs de redevance forfaitaire sur le trafic des poids lourds. Il en va de même pour un véhicule de 7,5 tonnes. Au lieu de 8245 francs, celui-ci n’en coûte plus que 825 en taxes s’il est limité à 45 km/h. Il est évident que cela représente un avantage considérable en matière de calcul des coûts, en particulier lorsque la vitesse plus élevée ne peut pas être exploitée, comme dans les zones urbaines ou de plus en plus souvent en dehors des agglomérations, à la campagne. En contrepartie, avec un tel véhicule, on est assuré d’être toujours en tête de la file. Le contrôle technique effectué lors de l’expertise est également moins strict et les intervalles entre les contrôles sont plus longs.
C’est au niveau des exigences imposées aux conducteurs que les choses deviennent vraiment intéressantes. Les conducteurs de camions doivent être titulaires d’un permis de catégorie C. Ils doivent également être titulaires du certificat de capacité OACP. Ces exigences sont justifiées et depuis leur introduction, le nombre d’accidents impliquant des camions a considérablement diminué. Les poids lourds conduits par des personnes incompétentes représentent un risque accru d’accident. Ce risque peut être fortement réduit grâce à une bonne formation et à un sens accru des responsabilités. Si le véhicule est limité à 45 km/h, aucune formation spéciale n’est nécessaire.
La catégorie F permet de conduire tous les véhicules à une vitesse inférieure à 45 km/h. A l’origine, elle était destinée aux petits véhicules et à la motorisation des personnes à mobilité réduite, ainsi qu’à la conduite de véhicules utilitaires ou de tracteurs agricoles. Etant donné qu’un permis de catégorie B autorise également la conduite de véhicules de catégorie F, toute personne titulaire d’un permis B peut conduire un camion de 45 tonnes. La formation adéquate n’est donc plus nécessaire. Outre la formation, les exigences médicales sont également assouplies: un seul œil suffit, une audition normale n’est pas requise et les troubles schizophréniques ne constituent plus un obstacle. Sans même parler du contrôle médical périodique, qui n’est plus nécessaire non plus.
L’obligation d’utiliser un tachygraphe et l’assujettissement à l’OTR 1 existent bel et bien, mais sont parfois remis en question. La limitation de vitesse pour l’OTR 1 est fixée à 40 km/h. Certains milieux souhaitent toutefois relever cette limitation à 45 km/h.
Ces assouplissements ont une influence considérable sur la concurrence économique que se livrent les entreprises de transport et sont source de problèmes sur les routes. Les avantages économiques sont très importants pour les entreprises régionales de transport travaillant avec des camions à benne basculante ou pour les livraisons en ville. Les économies réalisées grâce au non-paiement de la RPLP et la disponibilité accrue de personnel nuisent à la fluidité du trafic. Si ce modèle commercial se généralise, nous assisterons également à une augmentation du nombre d’accidents. Les dispositions relatives à la RPLP et à l’OACP devraient être adaptées avant que le nombre de ces véhicules n’augmente encore.
L’exemption de la RPLP pour les véhicules dont la vitesse maximale est inférieure à 45 km/h devrait être supprimée ou liée à un kilométrage annuel maximal. D’autres dérogations doivent être trouvées pour l’agriculture. La catégorie de permis de conduire F doit être limitée à un poids total de 3,5 tonnes. L’agriculture est bien desservie par la catégorie G40 et les autres secteurs ne devraient pas rencontrer de problèmes.
En soi, nous ne souhaitons pas étendre le champ d’application de la redevance sur le trafic des poids lourds. Il ne s’agit pas non plus de pénaliser l’agriculture. Toutefois, les lacunes existantes ne doivent pas entraîner une détérioration de la fluidité du trafic et de la sécurité routière, ni perturber la concurrence économique.
Texte et Photos: David Piras