Défossilisation sérieuse – Être ouvert aux nouvelles technologies

Véhicules et technique Ausgabe-06-2025

La technologie en pleine mutation: une seule technologie ne suffit plus pour atteindre les objectifs en matière de CO2 (photo: production de piles à combustible chez Bosch).

Tout le monde s’accorde aujourd’hui à dire qu’une approche globale est nécessaire pour atteindre l’objectif de zéro émission nette en 2050. Lors du 46e Symposium de Vienne sur les moteurs, il a notamment été souligné qu’il fallait aller au-delà de la décarbonisation.

Au fil des ans, le Symposium de Vienne sur les moteurs est devenu une institution qui, comme son nom l’indique, se consacre aux solutions de propulsion avancées pour les voitures, les véhicules de livraison, les camions et les bus. Comme l’ont souligné plusieurs intervenants, la propulsion électrique fait désormais partie intégrante de ce domaine. Néanmoins, le professeur Bernhard Geringer, hôte de la 46e édition, a introduit la conférence avec une note quasiment philosophique: «Sans carbone, il n’y aurait pas de vie sur Terre. Il est donc erroné de parler d’un objectif de décarbonisation.» Pour Bernhard Geringer, le véritable objectif est la défossilisation, c’est-à-dire l’abandon des énergies et des carburants d’origine fossile. «La décarbonisation comprend des méthodes telles que l’électrification et l’amélioration de l’efficacité, tandis que la défossilisation consiste à remplacer les matières premières d’origine fossile (pétrole, gaz naturel) par des alternatives telles que la biomasse ou les produits recyclés.» Bernhard Geringer critique donc également la législation actuelle de l’UE sur les flottes, qui se limite aux émissions de gaz à effet de serre des véhicules pendant leur fonctionnement. «Cette législation doit céder la place à une approche globale du système qui prend en compte l’ensemble du cycle de vie des véhicules, depuis l’extraction des matières premières et la production jusqu’à l’élimination.» Cela donnerait également une chance aux carburants neutres pour le climat et aux systèmes de propulsion efficaces sur le plan énergétique, tels que les prolongateurs d’autonomie.

Diversité comme condition préalable

«L’avenir ne sera pas déterminé par une seule technologie, mais par les fournisseurs qui en maîtrisent plusieurs», comme l’a également souligné Mathias Giannini, CEO de Horse Powertrain; cette entreprise est une joint-venture entre Geely, Renault et le groupe pétrolier Aramco, qui souhaite proposer des chaînes cinématiques complètes à tous les constructeurs automobiles du monde entier. Cette approche ouverte sur toutes les technologies confère une grande flexibilité en matière de motorisation, explique Bernhard Geringer, mais exige également une plus grande sécurité de planification pour l’industrie et le commerce européens. «Pour cela, des réglementations fiables de la part des pouvoirs publics sont nécessaires de toute urgence», selon Bernhard Geringer. Outre l’industrie automobile, c’est surtout l’industrie des énergies renouvelables qui est intéressée par un cadre juridique fiable, afin de pouvoir planifier à plus long terme les investissements dans le développement et la production.

Pour Frederik Zohm, directeur Recherche et Développement chez MAN Trucks & Bus, la mobilité électrique jouera également un rôle central dans le secteur des camions et des bus. Bien que MAN travaille également sur l’utilisation de l’hydrogène dans les moteurs à combustion et les piles à combustible, Frederik Zohm estime que d’ici à 2030, jusqu’à 90 % des nouveaux bus MAN et environ la moitié des nouveaux camions MAN seront équipés de moteurs électriques à batteries. Il considère que l’infrastructure de recharge à grande échelle est l’un des facteurs clés du développement de la mobilité électrique dans le secteur des véhicules utilitaires. Il demande donc également aux responsables politiques de mettre en place des conditions-cadres fiables pour permettre son développement rapide.

Les biocarburants

L’abandon des matières premières d’origine fossile réclamé par Bernhard Geringer bénéficie actuellement d’une attention croissante et met davantage l’accent sur l’hydrogène et les biocarburants tels que le biodiesel B100, le HVO100 ou le biogaz. Leur utilisation permet aux entreprises de transport et de logistique de réduire considérablement leur empreinte carbone, même avec des moteurs à combustion. Des efforts sont actuellement déployés au sein de l’UE pour classer les véhicules à moteur à combustion interne comme véhicules zéro émission s’ils sont également alimentés par des carburants renouvelables.

Alors que les batteries, les piles à combustible et l’hydrogène constituent des modes de propulsion écologiques évidents et faciles à comprendre, l’industrie est confrontée à un défi en matière de preuves en ce qui concerne le biodiesel, le HVO et le biogaz. C’est là qu’intervient Bosch avec sa nouvelle solution «Digital Fuel Twin». La solution logicielle intégrée au véhicule enregistre l’utilisation des carburants respectueux du climat et atteste la réduction des émissions de CO2. «Avec Digital Fuel Twin, les entreprises peuvent facilement prouver qu’elles utilisent des carburants renouvelables», affirme Thomas Pauer, président de Bosch Power Solutions.

Le logiciel enregistre les propriétés climatiques du carburant lors de sa production, de son transport jusqu’à la station-service et enfin lors de sa distribution au véhicule. L’accès est basé sur le cloud. La solution est encore en phase de test, notamment dans le cadre d’un rallye réunissant une flotte de 12 camions et voitures qui ont sillonné toute l’Europe jusqu’au 24 juin pour rejoindre Bruxelles, en utilisant exclusivement des carburants durables disponibles dans des stations-service publiques. A l’avenir, Digital Fuel Twin devrait être intégré dans l’électronique des véhicules de manière à empêcher toute manipulation.

Dans le domaine des poids lourds, pratiquement tous les constructeurs travaillent sur une approche multiple. DAF, par exemple, vient de lancer un moteur 13 litres (MX-13) spécialement adapté au biodiesel B100 afin d’offrir des perspectives de défossilisation aux transporteurs établis dans les régions où le biodiesel est plus répandu que le HVO100. Il faut maintenant obtenir rapidement une reconnaissance politique, afin que les équipementiers et les acteurs concernés, tels que les fournisseurs d’énergie, bénéficient désormais de la sécurité d’investissement nécessaire.

Texte: Martin Schatzmann 
Photos: Constructeurs