Les feux de signalisation – Les chefs d’orchestre silencieux de la circulation routière

Transport et infrastructure Ausgabe-10-2025

Les feux de signalisation décident qui roule et qui attend. Mais ils peuvent faire bien plus qu’afficher les couleurs rouge, orange et vert: chaque feu de signalisation est un petit centre de calcul doté de sa propre logique, de ses propres capteurs et de son propre flux de données. Que se cache-t-il derrière ces compagnons quotidiens tout aussi discrets qu’indispensables?

Au rouge, ils nous agacent, au vert, nous les remarquons à peine et au jaune, nous accélérons parfois alors que nous devrions freiner. Les feux de signalisation, ou comme disent les spécialistes, les installations de signalisation lumineuse, sont des compagnons permanents de la circulation. Que nous nous déplacions en camion, en voiture, à vélo ou à pied, sans eux, le chaos et les accidents seraient inévitables, car ils règlent la circulation et assurent ainsi l’ordre et la sécurité.

Même s’ils nous semblent tous identiques, chaque feu de signalisation est unique. Il est programmé individuellement en fonction de la densité du trafic, de la topographie et du volume de circulation. Les spécialistes parlent d’un calendrier de signalisation qui contrôle ce qu’on appelle les cycles. Un cycle est le laps de temps pendant lequel toutes les phases de signalisation (c’est-à-dire le vert, l’orange et le rouge) se déroulent une fois complètement sur toutes les voies. Selon la complexité, cela peut prendre jusqu’à deux minutes. Pendant ce temps, le système de contrôle veille en arrière-plan à ce qu’aucune voie ne gêne les autres. Et ce n’est pas une mince affaire, car aux grands carrefours, plusieurs programmes fonctionnent simultanément pour réguler le trafic dans toutes les directions.

La sécurité avant tout

L’objectif premier de tout système de feux de signalisation est la sécurité routière. Viennent ensuite les optimisations visant à fluidifier le trafic: les phases rouges et vertes sont réparties de manière à ce que le système tire le meilleur parti de chaque carrefour. Tous les usagers de la route sont traités sur un pied d’égalité. Il existe toutefois des exceptions à cette règle: afin de garantir la stabilité des horaires et les correspondances entre les bus et les trains, les bus et les tramways ont la priorité à certains feux de signalisation et peuvent traverser plus rapidement les carrefours ou les ronds-points grâce à des circuits spéciaux. La mise en place d’une vague verte est également possible: «Si un bus ou un tramway est en retard sur son horaire, le système peut interrompre la circulation et avancer la phase verte», comme l’explique Stefan Brendel, responsable du service de gestion du trafic de la Direction des travaux publics et des transports du canton de Berne (BVD). Alors que les véhicules prioritaires obtiennent généralement la priorité grâce à leur sirène et à leurs gyrophares bleus, des circuits spéciaux peuvent être activés pour les grands événements ou dans des cas exceptionnels. Cela facilite par exemple l’entrée et la sortie des parkings lors d’événements. «Ces circuits spéciaux sont activés et désactivés sur place par la police cantonale», ajoute Stefan Brendel. Les feux de signalisation sont intelligents. Ils enregistrent non seulement leurs propres activités, mais aussi les passages au feu rouge et la fréquence des véhicules. L’Office des ponts et chaussées du canton de Berne utilise ces données pour planifier le trafic. Cela permet d’identifier les endroits où le trafic est congestionné ainsi que les routes particulièrement fréquentées.

Feux défectueux ou anciens?

Comme pour d’autres appareils intelligents, les feux de signalisation peuvent également subir des dysfonctionnements. Bien qu’ils soient soumis à des contrôles annuels approfondis, les retours d’information de la population ou de professionnels, tels que les chauffeurs, sont pris au sérieux et traités rapidement. Si vous avez donc l’impression qu’un feu reste trop longtemps au rouge ou qu’il ralentit la circulation plutôt qu’il ne la fluidifie, vous pouvez vous adresser au service cantonal des ponts et chaussées compétent. Cependant, le fait que tous les feux passent soudainement au rouge ne signifie pas nécessairement que l’installation est défectueuse. Il peut s’agir d’un système dit de «vert à la demande». Ces feux sont par défaut au rouge et ne passent au vert qu’en cas de besoin, par exemple lorsqu’un piéton appuie sur le bouton ou lorsqu’un véhicule est détecté à l’approche des feux.Il n’existe plus qu’une douzaine de ces anciens systèmes dans le canton de Berne. Ils sont progressivement remplacés. La raison: ces systèmes créent une attente routinière chez de nombreux usagers de la route, qui s’attendent automatiquement à ce que le feu passe au vert. Et c’est précisément cela qui est dangereux. Car dans la circulation, la routine est souvent le plus grand ennemi de l’attention... et donc de la sécurité.

L’intelligence artificielle

Les feux de signalisation actuels fonctionnent avec des processeurs plus rapides, des commandes plus complexes, davantage de capteurs et consomment moins d’énergie que les modèles précédents. «Les nœuds routiers complexes peuvent ainsi être contrôlés beaucoup plus efficacement qu’il y a vingt ans», comme le confirme Stefan Brendel. Outre les feux de signalisation, les moyens de transport ont également évolué: «Avant, tous les vélos contenaient suffisamment de métal pour être détectés par induction. Avec les vélos en carbone, cela représente un défi pour nos capteurs», explique l’expert en circulation. L’intelligence artificielle pourrait-elle remédier à ce problème? Elle n’est pas encore utilisée dans le canton de Berne, mais le service des ponts et chaussées examine en permanence ce qui est techniquement faisable et échange régulièrement avec les autres cantons.

L’intelligence artificielle pourrait optimiser davantage la fluidité du trafic. Mais ce qui aide même sans intelligence artificielle, c’est le fait de freiner au feu orange plutôt que d’accélérer, s’arrêter avant la ligne blanche et surtout ne jamais s’engager dans le carrefour si un bouchon le bloque. Ces conseils peuvent sembler banals, mais «si tout le monde les suit, les embouteillages se résorbent beaucoup plus rapidement», affirme Stefan Brendel avec conviction. «En tant que conducteurs chevronnés, les chauffeurs routiers sont des modèles à suivre dans la circulation routière. Il est donc d’autant plus important qu’ils montrent l’exemple en adoptant le bon comportement aux feux de signalisation.» Ceux-ci ne peuvent être trompés par aucune manœuvre de conduite. Nous devons donc d’autant plus les considérer comme les chefs d’orchestre silencieux d’un trafic sans accident et suivre leur rythme, afin d’assurer la fluidité du trafic.

Texte: Fabienne Reinhard

Photo: Daniel von Känel