Après avoir célébré le 50e anniversaire d’Iveco (voir Routiers 6/25), les Turinois se concentrent à nouveau sur l’avenir. Dans le cadre d’un accord commun avec Tata Motors, les Indiens souhaitent racheter les Italiens et fusionner les deux entreprises au sein d’une société commune spécialisée dans les véhicules utilitaires. Cela donnerait naissance à un poids lourd mondial dans le secteur des véhicules utilitaires, avec un volume de ventes pouvant atteindre 540 000 camions et bus à l’échelle mondiale. A titre de comparaison: Daimler Truck, par exemple, a vendu environ 460 000 véhicules dans le monde l’année dernière, le groupe Volvo, environ 226 000 poids lourds et Traton, environ 305 000 véhicules utilitaires. Le chiffre d’affaires prévu devrait être réalisé à 50 % en Europe et le reste à raison de 35 % en Inde et de 15 % en Amérique.
Sous réserve de l’accord des actionnaires d’Iveco et des autorités compétentes, les transactions nécessaires devraient être finalisées d’ici à mi-2026. Pour cela, la cession de la division Défense au groupe d’armement Leonardo, déjà annoncée précédemment, doit également être réalisée.
Atteindre une stature mondiale
Tata Motors a récemment séparé sa division véhicules utilitaires de sa division voitures particulières. «L’acquisition d’Iveco permettra au nouveau groupe de s’imposer à l’échelle mondiale», déclare Natarajan Chandrasekaran, président-directeur général de Tata Motors. Les deux marchés stratégiques (Inde, Europe) constituent un avantage selon Natarajan Chandrasekaran. Cela s’explique par le fait que les deux entreprises disposent d’un portefeuille de produits complémentaires et ne présentent aucun chevauchement notable en termes de structure industrielle ou de présence géographique. Dans la déclaration commune, Tata s’engage à respecter l’orientation stratégique d’Iveco, ce qui constitue une annonce positive, en particulier pour les employés, mais aussi pour les fournisseurs et les clients. En conséquence, les structures industrielles et le personnel des deux entreprises doivent rester inchangés.
«Les perspectives d’avenir du nouveau groupe sont très positives», a également déclaré Suzanne Heywood, présidente du groupe Iveco, «en particulier en ce qui concerne la sécurité de l’emploi et le maintien de la présence industrielle de l’ensemble du groupe Iveco». Girish Wagh, directeur de Tata Motors, qualifie cette alliance d’«étape stratégique».
Selon lui, ce partenariat réaffirme également l’engagement en faveur de solutions de transport durables: «Ensemble, nous créons une entreprise résiliente et agile, prête à mener activement le changement.»
Pour Olof Persson, PDG du groupe Iveco, cette fusion avec Tata Motors ouvre de nouvelles perspectives pour améliorer encore les capacités industrielles: «Cela permettra d’accélérer les innovations dans le domaine des transports sans émissions et de renforcer notre présence sur les marchés clés à l’échelle mondiale.»
L’exemple de Jaguar Land Rover
Les Indiens ont déjà montré par le passé qu’ils pouvaient être sérieux lorsqu’ils annonçaient vouloir conserver les structures des deux entreprises. Depuis que Tata a racheté Jaguar et Land Rover en 2008 (il serait plus juste de dire «sauvé»), les Indiens ont laissé aux Britanniques une liberté quasi totale dans la stratégie de leurs marques, et le siège social est toujours situé au Royaume-Uni.
Dans le segment des véhicules utilitaires, on observe d’ailleurs une situation similaire chez l’équipementier néerlandais DAF Trucks. Après avoir racheté DAF Trucks N.V., alors en faillite, en 1996, la maison mère américaine Paccar avait laissé la direction de DAF à Eindhoven se charger de la stratégie à long terme. Aujourd’hui, DAF est un acteur puissant et innovant dans le secteur européen des véhicules utilitaires, qui a pris de court la concurrence en intégrant très tôt les nouvelles réglementations européennes en matière de masse et de poids. De plus, DAF est aujourd’hui également responsable du développement des moteurs pour Paccar. Dans le cadre de l’intégration à Tata Motors, le communiqué commun annonce également le renforcement des activités fructueuses d’Iveco dans le domaine des moteurs (FPT Motorenforschung à Arbon, TG). L’acquisition de l’entreprise indienne offre ainsi des perspectives positives à la Suisse en cette période plutôt instable.
Texte: Martin Schatzmann
Photos: Schatzmann / ITOY



